Primeur d’Aqui, la terre en partage

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Depuis plusieurs années maintenant, Adrien Pasteur cultive un lien vivant entre producteurs et restaurateurs. À travers Primeur d’Aqui, il orchestre une symphonie de légumes bio et d’agroforesterie, cueillis hier, livrés aujourd’hui. Et dans les cuisines de Julien Montassié, à L’Épicentre, cette fraîcheur devient inspiration, connivence et respect du vivant.

Presque chaque matin, Adrien Pasteur charge dans son utilitaire les cagettes du jour. Les carottes hâtives, les oignons doux, les courges à chair verte, les pois chiches frais, tout dépend des saisons évidemment. Mais rien ne dort en chambre froide : “On n’a pas de stock. Les légumes sont ramassés la veille, livrés le lendemain”. Chez Primeur d’Aqui, le temps se mesure à la main qui cueille.

Ancien directeur de restaurant à Paris, fils de restaurateur, Adrien connaît le besoin des cuisines : le légume qui craque, la feuille encore perlée de sève, le parfum juste. Alors il a créé Primeur d’Aqui en 2019, au sein de la coopérative d’activité et d’emploi Perspectives à Perpignan.

“Faire le lien entre producteurs et restaurateurs, c’était une évidence”, dit-il simplement. Derrière cette modestie, une organisation millimétrée, presque chorégraphiée : une trentaine de producteurs, tous engagés en bio ou en agroécologie, livrant près de soixante restaurants. Par mieux, des tables étoilées ainsi que des adresses libres et créatives. Comme celle de Julien Montassié, chef de L’Épicentre, à Perpignan, qui collabore avec Adrien depuis cinq ans : “Il nous soulage d’un vrai travail, confie le chef. Démarcher les producteurs, vérifier leur façon de cultiver… ce qu’il fait, c’est un métier à part entière”. Ce lien, fondé sur la confiance et le respect mutuel, s’est tissé au fil des saisons.

Ensemble, ils cherchent, testent, inventent. Primeur d’Aqui, ce n’est pas qu’un grossiste vertueux, c’est un laboratoire vivant. Adrien sème des idées avant des légumes. “J’achète des graines rares, raconte-t- il, et chaque année, on introduit quatre nouveautés.” La betterave Crapaudine, sucrée et fine, pour les desserts. Le pois chiche frais, le celtuce– une laitue à tige croquante. L’épinard fraise, le concombre citron, ou cette mystérieuse vigne chocolat dont la pulpe évoque le litchi et le fruit de la passion.

Ces curiosités végétales, cultivées dans le respect du sol vivant, trouvent chez Julien Montassié des échos poétiques. Car ici, le produit n’est pas un support, mais un sujet. Leur relation est faite d’écoute et de curiosité. Le chef demande, Adrien cherche. Parfois, la quête dure deux ans, comme pour cette fameuse celtuce qu’ils ont fini par acclimater dans les terres d’Elne. D’autres fois, tout naît d’un coup de cœur. Ce lien entre les deux hommes dépasse la simple logistique. Adrien ne négocie jamais les prix. Une manière de respecter le travail du producteur et de garantir au chef une vérité de goût. “Il a compris ce que les restaurateurs attendent aujourd’hui, dit Julien Montassié.

De la cohérence, de la transparence, et cette émotion brute que l’on retrouve dans l’assiette.” Dans les Pyrénées- Orientales, Primeur d’Aqui fait désormais figure de catalyseur. Son réseau s’étend jusqu’à Narbonne, Carcassonne, Bordeaux, et bientôt Paris – voire l’Espagne, où Adrien rêve de livrer les grands noms de Catalogne. Son audace et sa sincérité ouvrent les portes : “Je dépose un colis de légumes, sans rendez-vous. Le soir même, le chef appelle : “C’est quoi ces produits ? Je veux travailler avec vous.” Primeur d’Aqui n’est pas qu’un intermédiaire : c’est une passerelle sensible entre ceux qui cultivent la terre et ceux qui la subliment.

Primeur d’Aqui
T. 06 24 84 51 90
Instagram

“Chez Primeur d’Aqui, chaque légume est une histoire de confiance et de goût.”